Les Translatines à Bayonne, amis chemins du Chili et du Pays Basque

Dire qu'une nouvelle édition des Translatines à Bayonne est un évènement incontournable est une litote tant ce rendez-vous entre le public du Pays Basque nord et le théâtre contemporain d’Amérique latine et d’Espagne est ancré dans nos meilleurs souvenirs, et nos plus vives attentes.

Du 13 au 22 octobre, l'affirmation des convergences culturelles qui se produit depuis 30 ans n'aura même pas à se creuser la tête pour chercher à se renouveler, quand la déception est un sentiment inconnu de ceux, très nombreux, qui en ont fait leur Festival de prédilection, et acceptent contre mauvaise fortune bon cœur qu'il ne se produise sur un rythme de biennale.

Avec le mot "Chili 2011" qui barre son affiche, quand celle de 2009 portait le mot "Argentine", les Translatines annoncent la couleur, ou plutôt le menu.

On sait qu'il reprendra ses ingrédients connus (spectacles à des prix le plus attractifs possibles, concerts gratuits le soir, apéros critiques le midi au Café des Pyrénées) avec des arrangements épicés que l'on connait sans se lasser (dictature de Pinochet, avenir incertain, bouleversements politiques, et fureur de vivre et de créer).

Seuls ses auteurs invités formeront la part encore invisible de l'ensemble, sans que, derrière son air sage et ses lunettes infatigables, Jean-Marie Broucaret, le Directeur du Festival et du Théâtre des Chimères, n'ait jamais caché son affection pour un théâtre engagé, et viscéralement chevillé aux âmes.

A une semaine du début de ce rendez-vous, l'on pressent déjà, dans les thèmes présentés, que les spectacles ne seront pas de tout repos, tant la souffrance des corps préfigurera des déchirements des identités, des communautés, ou des réalités.

En ce sens, donner à voir un spectacle sur les enfants soldats ou sur les indiens Mapuche (que seul Google continue de surveiller malgré leurs combats incessants) ne relèvera pas, cette année encore, d'une assurance "commerciale" de garantie de satisfaction.

Les Translatines sont une proposition, pas une certitude, et la distance kilométrique entre le Chili et le Pays Basque ne se règle pas d'un coup d'avion. Son succès dépendra une nouvelle fois de la capacité du public de se rapprocher, de sortir de sa condition trop confortable de spectateur, et, le temps d'un spectacle, d'être à un souffle du visage de l'autre.

Cette démarche n'est pas sans risque, et, dans une logique qui l'honore, Jean-Marie Broucaret l'a testée avant nous.

C'est dans une banlieue de Santiago du Chili qu'il a pris le pouls de ce pays, et qu'il a trouvé ce profond écho désormais articulé en programmations sur Bayonne, Biarritz, Anglet et Boucau.

De mémoire de festivalier, le programme de cette année semble encore plus riche que les éditions précédentes, avec, en dehors de la thématique du Chili, l'unique représentation en Aquitaine, de "Te haré invencible con mi derrota" ("je te rendrai invincible avec ma défaite"), de l'Espagnole Angelica Liddell qui vient de frapper les esprits au dernier Festival d'Avignon.

Au Carré Bonnat (à partir du 5 octobre), puis sur les murs extérieurs du Marché de Bayonne, les visages de Chiliens saisis par le photographe Jorge Brantmayer n'auront plus qu'à fixer notre capacité à savoir bien regarder ce peuple, qui, depuis les bateaux envoyés par Pablo Neruda pour sauver les enfants de Gernika, n'a eu de cesse également de tourner son regard vers le Pays Basque.

Tout le programme sur le site des Translatines.